3ème crible : constructions et propriétés
     1-Démonter la "mécanique" de la multiplication :
          1-1 Quelques expériences visuelles
          1-2 Conclusions sur les expériences précédentes
           1-3 La réponse au pourquoi de la multiplication
     2-Les coûts de comptage des nombres entiers :

Le troisième crible...
ou comment construire l'ensemble des nombres premiers à la règle et au compas

 

proposé par Emmanuel Rossignol

Le troisième crible
Pourquoi ça marche
Comment est né ce 3ème crible
    1-Préambule
    2-USA, côte Est
    3-Number Theory
   4-Un vice de plus
   5-Un crible en deux heures chrono...
3ème crible constructions et propriétés

Celui-ci est encore inconnu  je crois ;-)

Merci à mon fils Olivier pour ses corrections. 
 Comment est né ce troisième crible...
(Emmanuel Rossignol - Astrium-GFI, mars 2002)

1- Préambule :

     J'ai eu la chance lors de mon passage par l'ENSEA(1) de Cergy-Pontoise entre 1987 et 1990 d'acquérir une solide formation de " mathématicien appliqué " tendance " traiteur de signaux et d'images ". A cette époque ce lieu était sans nul doute l'endroit privilégié en France où acquérir des fondements solides et surtout modernes en la matière. En effet, la " vieille garde poussiéreuse " des professeurs qui avaient bâti l'Ecole était " pédagogiquement " à bout de souffle, et l'accroissement continu des promotions entrantes avait provoqué la création soutenue de postes d'enseignants avec pour effet majeur d'amener un sang neuf en ce lieu que la sclérose guettait.
     La plupart des jeunes nommés étaient presque tous Agrégés de Cachan (2) et Major du concours de l'Agrégation ; donc tous des " gars " très solides qui avaient été formés par B. Picinbono (3) et connaissant parfaitement les textes majeurs de J.P. Kahanne relatifs à l'analyse fonctionnelle. Dans la même veine, le " Méthodes Mathématiques… " de L. Schwartz avait statut d'Ancien Testament. Parmi ces jeunes et brillants professeurs qui travaillaient encore presque tous à leur thèse de Doctorat deux d'entre eux formèrent mon esprit à jamais, d'abord Didier Demigny - spécialiste des architectures de calcul pour le TSI (4)- et Patrick Duvaut (5) -Théoricien omniscient du Signal - qui était un être pétri de classe et de culture dont les quelques rares filles présentes à l'Ecole étaient toutes amoureuses…

     En ce qui me concerne j'étais absolument hypnotisé chaque fois que j'assistais à un cours de l'un de ces deux " monstres sacrés ". Ces " deux là " m'apprirent à conceptualiser le monde physique en termes " d'espaces de signaux " et de " classes d'opérateurs " sur ces espaces. Hormis ces deux exceptions, le reste de l'enseignement était assez "médiocrement classique " pour un esprit naïf, vainement bouillant et salement contestataire comme le mien qui s'était imaginé qu'une école d'ingénieur pourrait lui apporter toutes les bases minimales des mathématiques et de la physique théorique…
     Le directeur de l'Observatoire Toulouse Midi-Pyrénées, Jean Paul Zahn, qui m'avait accordé une après-midi entière alors que j'étais en Spéciale avait bien tenté de me convaincre qu'il me fallait m'orienter vers la recherche pure - donc vers la Fac - mais le jeune crétin indécis et orgueilleux que j'étais n'avait pas écouté ce sage conseil et je m'étais laissé lâchement emporté par le " système prépas " qui, si vous ne savez pas rapidement à quoi vous vous destinez, décidera pour vous au mieux de ses intérêts - … et pas des vôtres !. En effet à cette époque dans les prépas, terminer à la Fac était synonyme de médiocrité… 

     Lorsque je quittais bruyamment l'ENSEA j'étais totalement frustré intellectuellement de n'avoir rien appris sur les dernières théories physiques et d'être un presque béotien en Mathématiques. En fait, je n'avais absolument pas réalisé que ces " gens là " avaient reçu pour mission de former des ingénieurs électroniciens… Je pris alors la décision d'aller chercher " ailleurs " ce qu'on n'avait pas su me donner - et que j'exigeais prétentieusement - et cet " ailleurs " était alors pour moi faussement situé outre-atlantique, où Patrick Duvaut avait en outre enseigné durant six mois sur la côte est.

  

 

2 - USA, côte Est :

     Lorsque j'arrivais aux USA, j'obtins assez rapidement par l'entremise des petites annonces du Washington Post un poste d'ingénieur de fabrication dans une entreprise de la banlieue qui fabriquait des caméras et des dispositifs de traitement des vues photographiques aériennes. La pitance et la couche étant assurées, je décidais d'aller rôder autant que mon temps libre me le permettait dans ces universités de la côte est dont j'avais entendu qu'elles étaient le berceau d'une partie conséquente de la Science Moderne.
     La première que je découvris fut Maryland State University, à College Park en banlieue Nord Ouest de DC, et je reçu un incroyable " coup de massue sur la tête en découvrant la bibliothèque du département des Sciences. A lui tout seul le bâtiment était plus grand et plus vaste que l'ENSEA toute entière !. Des bouquins à profusion ! Maths, physique théorique, physique appliquée, revues du monde entier ! tout était là concentré en quelques centaines de mètres de rayonnages. Le premier mois, je n'eus de cesse de comparer l'endroit à ce que j'avais connu en France (6) . Et en plus, les écoles d'ingénieur étaient ici dans les Facs !… Donc dans mon esprit à quelques centaines de mètres tout au plus de la " Caverne d'Ali-Baba ".
     En TSI une " nouvelle branche " faisait éclater avec délice ses bourgeons prometteurs : l 'analyse par ondelettes. Ça se passait là, où j'étais et vivais… Mon patron m'avais demandé de lui élaborer une note de synthèse sur le sujet afin de voir si nous ne pourrions pas dans un futur assez proche tirer quelque chose de tout cela pour nos chaînes numériques de traitement de vues aériennes. Qui plus est, les quelques Français qui comptaient dans cette discipline naissante étaient présents sur la côte est, dont le fameux Stéphane Mallat à New-York. Je dévorais alors, pendant mes soirées et mes week-end, tout ce qui me tombait sous la main en théorie du signal et de l'image.

     J'avais pris l'habitude d'occuper à la bibliothèque des sciences de Maryland State toujours la même loge d'étude, située à quelques encablures seulement des volumes de Maths appliquées. Rapidement je constatais que deux autres habitués faisaient de même. Deux étudiants de quatrième année en mathématiques " pures ". Ces deux là avaient choisi comme thème de mémoire d'exposer les grandes problématiques et les avancées récentes en Théorie des Nombres. Bref je constatais rapidement en espionnant passivement leur huis-clos susurrant qu'ils avaient de leur sujet une connaissance académique qui m'était parfaitement étrangère (7) .
     Ils remarquèrent rapidement que je notais en marge de mes brouillons les noms et la substance des théorèmes qu'ils mentionnaient. N'y tenant plus, ils m'interpellèrent et m'offrirent de lire et de critiquer le prototype de mémoire qu'ils avaient préparé, tout en m'invitant à décliner mon identité ainsi que mes axes d'étude. Je m'exécutais poliment, gêné d'être découvert. Ils me firent rapidement comprendre que mes scrupules policés avaient de ce côté-ci de l'Atlantique un goût trop vieillot à leur sens, et très Européen de surcroît. Pour eux, la faute de goût ne se fondait nullement sur le caractère introverti d'un " espionnage à trois francs-six sous" mais bel et bien sur mon inaptitude à leur témoigner ouvertement mon intérêt pour leur production.
     Je tentais malgré tout de me défendre en leur avouant que rien dans ma formation antérieure ne m'avait prédisposé aux Mathématiques " pures ", que je me considérais avant tout comme un " matheux appliqué ", et encore très restreint dans ses objectifs, et je leur assurais mordicus que je ne possédais pas même le dix-milième du bagage théorique et culturel nécessaire à une critique pertinente de leur travail. Très Américains et donc allant droit au but, sans détour et de façon pragmatique, ils m'expliquèrent alors que bien au contraire j'étais le cobaye idéal pour eux puisque, se destinant tous deux à la carrière d 'enseignant, le mémoire en construction serait aussi noté sur son caractère pédagogique. Leur tuteur les avait prévenus : " plus votre job sera capable de faire passer un maximum d'idées et de concepts sur le sujet à un quidam ignorant tout, meilleure sera votre note !… "
     Je me retrouvais donc " embarqué " dans une expérience pédagogique dont j'étais le sujet d'étude maintenant désigné, avec à la fois l'envie pressante de démarrer et de découvrir ce que ces deux " apprentis-sorciers " feraient de moi, couplée à la crainte de les décevoir et ainsi de transformer une expérience en fiasco stérile. Ils me confièrent donc une copie fraîche des premiers chapitres du mémoire avec pour tâche d'annoter les endroits où je pourrais ne pas comprendre le propos, ou bien ne plus suivre le déroulement du texte.

 

  

3 - "Number Theory" :

     Le soir même j'entamais la lecture du mémoire. Je dois le confesser aujourd'hui, je fus pris à contre-pied par la façon dont l'ouvrage était structuré tout autant que par le style en apparence léger qui y était employé. A n'en pas douter mes deux " expérimentateurs " connaissaient leur sujet dans ses moindres recoins. Tout y était ou presque: historique, approche classique, les travaux de Fermat - qui au passage était devenu originaire d'une " petite ville du sud de la France près de Bordeaux… ", la notion de " voisinage " peut-elle à ce point influencer la perception qu'ont les mathématiciens de la Géographie ?!… - l'approche algébrique, la théorie des congruences, nombres p-adiques etc, etc…jusqu'à, bien sûr, la fameuse fonction Zéta de Riemann. Bref, rien de tout ce qui est supposé connu d'un étudiant entrant en troisième cycle et souhaitant se spécialiser dans le domaine n'était omis.
     Pour ma part, et à l'exception des quelques lieux communs presque toujours mentionnés dans les " taupes " de France et de Navarre, je découvrais presque tout de cette partie des Mathématiques dont j'avais certes entendu parler à maintes reprises mais que je tenais pour un amusement très snob réservé aux Grands Mathématiciens Purs à leurs heures perdues. Le pendant en quelque sorte pour les " matheux " du Polo pour la haute société Anglaise. Ayant de tous temps dévoré maints ouvrages traitant de l'histoire des Sciences et des Mathématiques, j'avais retenu que tous les Grands de la discipline avaient à un moment donné de leur existence produit des résultats dans le domaine.
     Pendant un mois environ, deux à trois fois par semaine, je retrouvais mes deux " expérimentateurs " dans la loge d'étude et leur transmettais scrupuleusement mes remarques sur tel ou tel point : " là, j'ai pas vraiment compris l'idée que vous abordez ", " ici je ne vois pas très bien comment vous liez d'ici à là… ", " dans la petite démonstration ici, je ne vois pas le passage de cette ligne à la suivante… ".
     Au final, l'exposé était un survol d'environ 80 pages de tous les travaux marquants qui avaient jalonné la Théorie des Nombres depuis l'origine, agrémenté de nombreuses mises en perspective historiques, de nombreuses figures et dessins destinés à " faire sentir " les problèmes plus qu'à les creuser. C'était pour moi un travail comme j'en avait rarement vu dans les mémoires des bibliothèques françaises - où l'austérité est la règle, la recherche de la difficulté et de l'axiomatisation un sacerdoce, et " l'ultra-technicité " des démonstrations un must.
     Il y avait quelque chose " d'Hollywoodien " dans la structure autant que tant la forme : du rythme, du suspens, une " photographie " généreuse et en Technicolor, des rebondissements. Bref, on en prenait plein les yeux !… et le novice inculte que j'étais en la matière ne tarda pas en quelques semaines à acquérir une connaissance " touristico-New-Yorkaise " de la Théorie des Nombres - à l'instar des Américains qui, voyageant de manière très organisée en Egypte pour dix jours, Coca-Cola et caméscope en bandoulière, deviennent au retour chez eux les égyptologues d'un mois dans leur voisinage, intarissables sur les techniques d 'embaumement des Pharaons…

 

  

4 - Un vice de plus !... :

     Finalement et avec le recul des années, je dois concéder que mes deux co-locataires de la bibliothèque scientifique de Maryland State University ont réussi leur " coup " ; du moins en ce qui me concerne. A partir de la mi-mai de cette année 1991, je ne les revis plus ; ils avaient dû soutenir le fameux mémoire et s'étaient probablement envolés vers des vacances sans doute méritées. Mais le fait est que chaque jour, de plus en plus souvent, au travail comme dans la rue, ces " petits cailloux dans la chaussure " qu'étaient à mes yeux les conjectures et questions " importantes " de Théorie des Nombres commencèrent à me hanter, à m'obséder plus précisément.
     Je ne parvenais pas à admettre que ces questions aient une utilité quelconque, en terme de rapport immédiat pour Monsieur-tout-le-Monde. J'étais à la fois un peu méprisant vis à vis de cet " amusement snob " sans retombées directes mais aussi cruellement pensif et songeur sur ce " vice " qui à partir de notions basiques et d'énoncés " ultra-simples " produisait rapidement des problèmes d'une technicité et d'une complexité inouïes !… Rien de commun donc avec la branche des " Maths applis " dont on m'avait enseigné les rudiments. Là, il fallait avoir fait " ses classes ", s'être approprié le vocabulaire, les notations ainsi que les méthodes générales. Tout cela était bien cadré, et somme toute assez bien maîtrisé.
     M'étant procuré un texte introductif en anglais - " Fundamentals of Number Theory " par W. Levêque - sa lecture me conforta dans mon appréciation. Ce domaine des Mathématiques me semblait de jour en jour une forteresse inattaquable. Les plus Grands Généraux de l'Armée " matheuse " avaient mené un jour ou l'autre l'assault, mais le bastion avait toujours résisté !… sans pour autant arrêter la marche en avant des Conquérants de l'Equation, Chevalier de la Matrice. Finalement je me faisais la réflexion que ce n'était pas tant la prise de la place-forte qui importait, mais bien plutôt l'opportunité qu'elle offrait de mettre au point de nouveaux " armements ".
     Parmi les " petits " problèmes un en particulier m'exaspérait, tellement il était à mes yeux futile : celui des premiers jumeaux. Deux mois auparavant, je n'avais jamais entendu parler de cette notion, et voici que le fameux mémoire m'expose leur existence tout en statuant qu'on n'était toujours pas parvenu a démontrer leur " infinitude ". J'en étais parvenu à un degré d'exaspération et d'indignation absolue quant au " problème des jumeaux ". Je me souviens avoir pensé - en bon Toulousain - tout en réglant un problème de programmation sur une des machines à commande numérique de l'atelier :
     " P . . . . . , y'a des gars payés qui passent des heures dans des labos de maths pures à essayer de dégommer ce truc !… C'est nul !… Et alors ! s' ils trouvent la démo, à part pour la Connaissance…ça rapportera que dalle !…Feraient mieux de bosser sur des générateurs automatiques de code pour usiner ces pièces : hop ! je te file la géométrie cotée de la pièce, deux ou trois moulinettes tirées de la géométrie projective, et zou ! t'as le code tout cuit prêt à télécharger ! y'a plus qu'à régler les offsets des fraises !… "

  

5 - Un crible en deux heures chrono…:

     C'est cette semaine là de juillet 91, que je décidais de " tordre le cou " à ce dilemme des premiers jumeaux. Pas moins !… j'étais comme on le dit " remonté à bloc ". Un après-midi donc, dès mon retour dans mon studio j'empoignais feuilles blanches et porte-mines et commençais à ébaucher mentalement une stratégie d'attaque. J'ai encore très clairement présents à l'esprit les chemins que j'ai - avec surprise aujourd'hui !… - empruntés presque instantanément. Les voici retracés, comme toujours dans ces cas là, je m'interpelle et m'invective mentalement :
     " Bon ! ces affaires de premiers c'est pas de la tarte !… Vu ton niveau technique, faut pas chercher dans les voies déjà prises par les Kadors ! autant que tentes l'Everest face Nord en bermuda !… Donc les voies classiques, c'est pas pour toi ! Niet !… T'as pas le niveau là dessus, faut aborder la chose par autre part ...
     " Bon, voyons…dans les autres domaines comment on fait quand ça devient trop dur ?… On mets tout à plat ! on atomise, on analyse… Ouais ! là c'est la recette à Descartes…Mais bon ! faut pas que tu rêves… La méthode à Descartes, ils ont déjà dû tenter le truc les Pros… Et vu ce que t'en sais aujourd'hui, çà a rien donné !… toujours là ! le truc de Fermat et le reste…
     - petit temps mort dans le flot de la pensée…
     " Y'a plus que les fondements à attaquer !…c'est gonflé quand même !…
     - souvenir du cours d'histoire de CM1 :
     " Après tout quand les autres ils ont voulu reprendre Château Gaillard aux Anglais, ils ont attaqué les fondations !… ils ont tout dézingué et çà a pas traîné !…çà peut rapporter… Après tout !…
     - re : petit temps mort dans le flot de la pensée…
     " Bon alors ! le point dur, c'est les premiers… D'où qu'ils viennent ceux-là ?!… de la multiplication pardi !… Et la multiplication…la multiplication… Non ! t'es vraiment givré !… Si jamais t'as rien au bout, et que tu dises à un " Pro " un jour que t'as gambergé sur les fondements de la multiplication, t'as l'aller simple vers les " petites maisons de Charenton " !…
     - encore : petit temps mort dans le flot de la pensée…
     " Pourquoi pas après tout ! t'es pas dans ton pays, personne te connais ici, donc si tu te payes un coup de folie personne en saura rien si tu la boucles !…Alors, multiplication… multiplication… Voyons ! comment on t'a fait çà à toi au primaire ?… Ouais ! y avait les tables là derrière tous les cahiers… fallait les connaître ces trucs !… Ouais, c'était au CE1 ou au CE2… je crois…Et au CM2, " machin " il s'était fait allumer parce qu'il connaissait plus sa table de 6 … Elle avait dessiné les croix au tableau, en carré, en lui criant dessus… et elle frappait la craie sur chaque croix en les comptant une par une !…
     - synthèse mentale rapide sur la préhistoire des Maths dans les civilisations humaines :
     " Tiens c'est vrai çà… c'est pas que nous en Occident qui avons sorti les tables de multiplication…Les Indiens aussi je crois… Les Incas pareil il me semble… Tiens tiens tiens… Le zéro on sait que çà a démarré en Inde et que les Arabes nous l'ont refilé… La multiplication on dirait que c'est apparu partout… de tous temps…Oui mais alors Pourquoi ?!… Ouais, pourquoi ?!…
     - rassemblement des esprits. Çà frise la folie ces pensées. Je me fais vraiment honte à ce moment là… Mais bon ! je pousse quand même le bouchon…
     " Bon ! faut pas s'énerver… c'est Quoi la multiplication ?!… Voyons t'es à la maternelle, on commence a t'apprendre à compter… sur tes doigts… bref ! tu apprends à nommer les nombres… fonction " successeur de "… Et après ?… on t'apprend à additionner… premier acte mathématique de ta vie…et après ?!… t'apprends à multiplier… deuxième acte mathématique de ta vie…Et çà, partout sur la planète et de tous temps… Toutes les civilisations ou presque…et derrière les cahiers d'écolier !… je te parie que les Chinois aussi, ils leur mettent les tables au dos des cahiers…
     - petite pause de quelques secondes…
     " Voyons, voyons… si de tous temps et partout les civilisations dépensent tant d'énergie à faire rentrer ces tables dans la tête des gamins c'est que c'est vachement important pour la suite !… Oui mais pourquoi ?…C'est quoi l'invariant là ?… le petit Inca y'a quelques siècles sur son plateau des Andes, le petit Chinois demain dans son école… Et toi y'a 26 ans de çà… Qu'est ce qui nous lie ?… pas la langue !… pas l'Histoire !…Pourtant y'a bien un invariant là dessous !… Ouais ! faut chercher l'invariant dans cette affaire…
     " Bon voyons…multiplier çà sert à quoi ?… à compter pardi !… Et compter… Compter… Ouais ! tous les humains partout et de tous temps dès qu'ils sont en civilisation ils comptent… Ouais, et même on passe un sacré foutu temps à compter tous dans notre vie. Le petit Inca, le petit Chinois et toi aussi tu comptes toute ta vie… Tous les jours en fait… C'est presque aussi banal que de respirer…Chez le boulanger tu comptes, chez le boucher, même quand on joue…Ouais mais alors pourquoi la multiplication et pas seulement l'addition ?!… çà suffit l'addition pour compter…
     - souvenir du tableau du CM2 avec les croix disposées en carré de la table de 6, çà devait être " 6x4 " :
     " Mais bon ! qu'est-ce que c'est alors la nature de ce truc là !… pourquoi ?!…je la revoie là, l'instit du CM2 avec sa craie… au ralenti… qui tape en criant sur les croix… tic… tic … tic…tic…tous dans la classe à ce moment là on a pas bronché !… mais on comptait avec elle dans la tête…Alors elle se retourne vers " machin " et toujours en lui criant dessus elle compte les bords du carré…tic…tic…tic… de ce coté, puis re-tic…tic…tic et encore tic sur le coté perpendiculaire…
     - Le déclic…
     " Ben oui !…c'est tout simple !… la disposition en carré c'est parce que comme çà, en carré, tout cerveau humain est capable de déceler la régularité selon les deux axes du plan !…Et en comptant les bords seulement çà produit moins de " tics " qu'en comptant toutes les croix !… Ouais çà devient clair là !… la multiplication c'est pour optimiser le dénombrement…Pour y passer moins de temps, moins de " tics "… Et comme tous les humains sont mortels, que le temps est précieux, alors faut optimiser les choses banales qu'on fait tous les jours !… et une fois qu'on a tabulé la multiplication dans les cerveaux des gamins, c'est pour la vie entière qu'on a gagné du temps sur le comptage…le coût temporel du retour par la mémoire d'une opération tabulée comme la multiplication c'est presque nul en terme de temps…çà se voit pas sur les petites quantités, mais sur des arrangements de croix de 17 par 15, celui qui aurait passé du temps gamin à apprendre les tables jusqu'à 20, et bien il y gagne… il va plus vite que les autres, qui vont devoir poser la multiplication à la main ou sortir la calcu…
     " C'est çà ouais l'explication… la multiplication est née partout de 3 ingrédients de base : un, nous sommes mortels et nous devrons compter tous les jours ; deux notre cerveau est pré-câblé pour reconnaître les arrangements réguliers plans, instinctivement nous " voyons " qu'il manque une ou deux billes d'argile dans un carré de 17 x 19 dont nous ne connaissons pas à priori le nombre de billes ; et trois : en utilisant des tables gravées dès le plus jeune age dans notre cerveau, programmées comme une PROM donc, le coût du comptage du TOUT régulièrement arrangé sur deux axes se ramène au comptage des BORDS qui est toujours MOINDRE…
     " finalement tout çà c'est comme les pipe-lines de traitement à la volée sur silicium, quant on veut aller au plus vite faut laisser tomber les multiplieurs et les additionneurs génériques et pré-câbler les opérations répétitives dans des LUTs…(Look-Up Tables)
     " Bon maintenant faut voir si çà se quantifie cette histoire ?!… peut-être pas…
     Je commençais alors à prendre tous les entiers de 1 à 50 environ et établissais la liste pour chacun d'eux des divers coûts de comptage possibles - que je nommais d'abord " entropies de comptage (8) "… J'ai changé la dénomination 5 ou 6 ans plus tard, l'originelle me paraissant trop pompeuse :
     " …16 voyons… bon ! en file indienne…entropie 16 ! puis sur 2 rangs… entropie 2+8, 10 !… 4 rangs, entropie 4+4, 8 !… Bon pour 16, trois entropies possibles : 16, 10 et 8, on trace…
     Je reportais sur un graphe cartésien en ordonnées les " entropies " possibles pour chaque entier et vers 30 ou 40, je ne me souviens plus exactement, je vis apparaître la dispositions de mes points en droites ?!… " Ah tiens ! me dis-je, c'est réglé tout çà ! " . Je mis environ 2 à 3 minutes pour trouver l'équation générale de cette famille de droites et les règles de disposition des points d'entropie sur ces dernières. Il apparut de suite un problème pour la première droite, dont l'équation était : y = x/1 + 1. Mais mes points étaient systématiquement 1 unité en dessous… Je réalisais alors que le coût de comptage dans le plan de 16 billes alignées sur un rang n'était pas 16, mais bien 16 +1 = 17 !… Eh oui ! un " tic " de plus pour le " coté " de " longueur 1 ". Il fallait bien " projeter " le réseau de billes sur 2 axes !…
     J'eus quand même à ce moment là honte de n'avoir pu extrapoler la construction de tête. Je me souviens très bien avoir pensé n'être qu'un " gros nul " pour avoir attendu 30 ou 40 entiers avant de comprendre qu'un simple faisceau de droites " bêtes " me donnerait la solution sans en passer par des manipulations enfantines :
     "Si un Pro te voyais avec tes billes d'argiles en carré dans la tête et ta comptabilité d'épicier, il t'éclaterait de rire au nez !…
     J'apportais les corrections idoines à un graphe plus grand - allant cette fois-ci jusqu'à 100 - et ce " truc " me paraissait si simple, si " béta " que j'avais du mal à me convaincre qu'aucune erreur ne s'était glissée dans le graphe… J'étais apaisé d'avoir trouvé une " explication " à la genèse de la multiplication, mais ce graphe " trop simple " me paraissait suspect. Après vérification intersection par intersection - et j'avais pourtant le système d'équations le régissant ainsi que ses solutions ! - je dus admettre que le graphe était juste.
     Mais alors instantanément, je me fis la réflexion qu'une figure aussi simple avait forcément, nécessairement été déjà tracée par un mathématicien dans l'histoire. Enfin ! c'était si élémentaire ce " truc ". Un gosse pouvait le construire, tout comme je l'avais fait !…
     Les premiers m'apparurent instantanément comme les entiers ne possédant qu'un seul coût de comptage possible - évident ! pas de " mise au carré " possible… - mais considérant la démarche que j'avais suivie pour arriver à cette figure, je décidais alors sur ma lancée d'explorer le concept naissant en dimension 3 et supérieure… Mais là, j'empiète sur le prochain texte…
     Cependant, j'appris bien des années plus tard, vers 1998, que ce " crible " était probablement original. Mais j'ai longtemps considéré que cette " production graphique" issue d'un " coup de folie passager " n'avait grande valeur dans la mesure où elle avait probablement été déjà explorée… et en plus, c'était si simple !…

 


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(1)Ecole Nationale Supérieure de l'Electronique & de ses Applications.
(2)Agrégation de Physique Appliquée… donc électroniciens.
(3)Aujourd'hui Directeur de Supélec, et " Pape Français " du Traitement du Signal. (3 vol. chez Dunod)
(4)Traitement du Signal & de l'Image.
(5)Qui fut le fondateur chez Hermes de la collection "Traitement du signal".
(6)Le département de physique avait même au sous-sol un immense labo dans lequel avait trôné un synchro-cyclotron de taille conséquente !… J'ai vraiment regretté à cette époque de n'être pas né Américain.
(7)Force est de constater que la Théorie des Nombres n'a jamais été considérée en France que comme un "sous-produit" de l'Algèbre… " déclarée " par certains professeurs que j'ai dû supporter : " création et spécialité des Mathématiciens Allemands ", à la différence de l'Analyse (Intégration comprise) qui Elle est bien sûr un " pur produit de l'Ecole Française " ?!… " Voyez donc jeune homme Borel, Lebesgue, Schwartz et autres pour vous en convaincre… " . J'ajoute caustiquement : Rompez les rangs…et si Ils y touchent nous règlerons cela dans la tranchée !
(8)J'
avais appris en cours de Théorie de l'Information que justement " l'information " avait été définie comme étant une " nég-entropie ". … Bref " entropie " çà sonnait bien !… mais c'était quand même pompeux.